Lésions internes
Thorax, abdomen, bassin
Des traumatismes violents sont à l’origine de lésions internes hémorragiques.
Mais un simple coup peut aussi faire saigner comme la rate.
Il est important de connaître les circonstances de l’accident : un choc à grande vitesse ou contraire retrouver un modeste coup au ventre datant de plusieurs jours (rupture de rate en 2 temps).
Les 2 complications principales sont la détresse circulatoire et respiratoire.
Le bilan recherchera les signes de choc : comme la pâleur, le pouls rapide et filant, la soif et la chute tensionelle (mais peut rester normale).
La détresse respiratoire (traumatisme thoracique) est facile à diagnostiquer.
L’examen de la région recherchera contusion, plaie, éraflures, éviscération ou douleur provoquée.
Si le blessé urine, vérifier la couleur (sang ? = hématurie).
En attendant l’arrivée d’une équipe médicale, on pratiquera les gestes habituels.
Le blessé sera rassuré, oxygéné, installé à plat dos et au besoin jambes surélevés.
Notions de base
Niveau d’acquisition et limites d’exigence:
L’enseignement en physiopathologie doit être suffisant pour permettre au candidat d’identifier les signes d’alerte afin de mettre en œuvre les procédures d’urgence adaptées, sans entrer cependant dans un niveau de détails trop important afin de rester dans le cadre des missions de l’ambulancier.
Notions d’anatomie
◁ Revoir anatomie cage thoracique
◁ Revoir anatomie intérieur thorax
◁ Revoir anatomie de l’abdomen
- Anatomie
- Thorax
- Abdomen
- Bassin
De gros organes généralement bien vascularisés (plein de sang) sont à l’intérieur de :
- cage thoracique ou thorax
- abdomen ou ventre
- bassin
La cage thoracique est constituée de 12 cotes avec le sternum devant.
Les 11 et 12 ème ne rejoignent pas le sternum.
L’intérieur du thorax contient:
les poumons
le coeur
les bronches
les gros vaisseaux
En résumé plein d’organes vitaux contenant une grande partie du sang de la circulation.
Sous les côtes à droite il y a le foie et la rate à gauche.
2 organes plein de sang.
Tous les viscères (intestin, colon) sont aussi très bien vascularisés et peuvent aussi saignés.
De plus ils peuvent se déchirer
ou se perforer.
Derrière se trouvent les 2 reins et l’aorte, encore des organes contenant du sang.
En conclusion le risque traumatique est l’hémorragie et/ou la perforation.
La partie principale est composée des 2 os iliaques.
Ils s’articulent avec le sacrum (articulation sacro-iliaque)
Le devant de l’os s’appelle le pubis.
Juste derrière, il y a la vessie.
L’aorte se divise en 2 et donnent naissance aux 2 artères iliaques.
De nombreux muscles puissants très vascularisés longent les iliaques.
1 : Hypochondre droit 2: Epigastre 3: Hypochondre gauche 4 : Flanc droit 5: Région péri-ombilicale 6: Flanc gauche 7 : Fosse iliaque droite 8: Hypogastre ou région sus pubienne 9: Fosse iliaque gauche |
Lésions
Circonstances
Du simple coup au ventre vite oublié au polytraumatisme.
Il n’y a pas forcément d’hématome, d’œdème ou de plaie à l’endroit du traumatisme.
Des lésions graves des organes, peuvent se voir sans signe cutané de lésion, notamment après une décélération brutale. (Voiture ou moto contre un mur).
Lésions du thorax
Fractures de cotes
Une ou plusieurs côtes sont cassées par choc direct ou par écrasement (ex. : volant de voiture) comme un morceau de bois que l’on casse.
Rappelons que sous les dernières côtes, se trouve à droite le foie et à gauche la rate.
Ces 2 organes sont dans l’abdomen (ventre) et peuvent donc saigner avec une fracture de côtes associée.
Volet costal
C’est un morceau complet de la cage thoracique qui est enfoncé par deux séries de fractures.
La conséquence est une gêne respiratoire extrêmement grave.
Si vous avez compris la physiologie respiratoire, la pression est négative à l’inspiration dans la cage thoracique et si la paroi n’est plus rigide, la zone traumatisée va , à l’inspiration, s’enfoncer dans la cage thoracique contrairement à l’ensemble qui lui se dilate. C’est un paradoxe.
Cet enfoncement est à l’origine d’une grave détresse respiratoire.
Si vous reprenez l’astuce de la seringue et du piston décrit à la page physiologie respiratoire, découpez une rondelle dans la seringue et remplacer le morceau par un bout de caoutchouc, lorsque vous abaissez le piston, la pastille souple s’enfonce.
Lésions de la plèvre
La fracture de côte peut perforer le poumon. Il y a une fuite d’air entre le poumon et la paroi interne (pneumothorax) ou de sang (hémothorax).
(Pneumo = pneumatique; Hémo racine pour sang: hémoglobine, hématologie, hématie…).
Un coup de couteau ou une plaie par balle auront les mêmes effets.
Le poumon se ratatine (comme un ballon) et n’est plus fonctionnel.
Le blessé respire avec un seul poumon.
Pneumothorax |
Pneumothorax |
Pneumothorax (Radiographie) |
Hémothorax |
Hémo-pneumothorax (Radiographie) |
La présence d’air sous la peau (emphysème sous cutané) (gonflement style “Bibendum Michelin”) signe une lésion de la plèvre et du poumon (avec fracture de côte).
(En appuyant légérement on a l’impression de marcher dans la neige).
Lésions du poumon et des gros vaisseaux
Elles sont très graves, suite à un accident très violent (notamment une décélération brutale comme une voiture heurtant un mur à grande vitesse).
Aucune lésion n’est apparente.
La détresse circulatoire peut d’emblée être majeure.
Mais la détresse peut survenir brutalement plus tard pendant le transport.
Une plaie par arme blanche ou balle, si elle traverse un vaisseau ou le coeur aura des conséquences dramatiques immédiates.
Si le poumon a été perforé, il y a des bulles qui sortent par l’orifice.
On dit que la plaie est “soufflante”.
Ex.: Un motard heurte à grande vitesse la glissière de sécurité d’une autoroute
Aucune lésion et tension artérielle normale
Transport sans problème
Décès brutal 3 heures plus tard (expérience vécue)
En fait l’aorte était fissuré et se déchire secondairement
La notion de décélération est importante à connaître pour le médecin qui prescrira un scanner corps entier à l’arrivée aux urgences.
Lésions abdominales
L’abdomen contient des organes plein de sang : à droite le foie, à gauche la rate, derrière les 2 reins.
De nombreux vaisseaux
y compris aorte et veine cave circulent dans la cavité abdominale.
Un coup direct ou une décélération brutale peut les déchirer.
Rupture de rate
C’est une urgence vitale “classique” rencontrée de temps en temps par les urgentistes.
La rate est un petit organe située dans l’hypochondre gauche (sous les côtes) (violet sur le dessin).
Très superficielle, la peau est juste en dessus.
C’est pourquoi un choc direct même minime (chute de vélo, guidon, coin de table…) peut suffire à la déchirer.
Selon la grandeur de la déchirure, l’hémorragie interne sera immédiate ou progressive sur quelques heures.
Comme elle est enveloppée d’une membrane, l’hématome peut rester local et l’ensemble se déchirer brutalement quelques jours plus tard.
Parfois le patient ne se souvient plus du traumatisme.
Ne pas oublier de rechercher un ancien traumatisme et/ou une éraflure de l’hypochondre gauche devant un état de choc isolé.
Traumatisme des reins
Un rein peut se déchirer et saigner dans la cavité abdominale mais aussi dans les voies urinaires.
Ne pas oublier de vérifier que les urines ne sont pas rouge (hématurie). (Ne pas forcer le blessé à uriner).
Lésions internes du bassin
Le bassin contient de nombreux organes: tube digestif, organes génitaux et surtout appareil urinaire et des gros vaisseaux: artères et veines.
Les masses musculaires longeant l’os iliaque sont très vascularisées.
Lésion bénigne
Un choc direct sur le devant du bassin a peu de conséquences si ce n’est douleur et impotence fonctionnelle.
Il s’agit en général d’un choc direct. (fracture du pubis)
Lésion grave
Par contre un écrasement du bassin par une roue d’un camion aura des conséquences dramatiques avec hémorragie interne et collapsus difficile à traiter.
La vessie peut être perforée.
Ne pas oublier de garder les urines si le traumatisme souhaite uriner.
Complications
Détresse circulatoire
Une hémorragie interne (non visible contrairement aux hémorragies externes et extériorisées) de moyenne ou grande abondance entraînera tôt ou tard un état de choc.
Mais attention, l’organisme va réagir. Il va fermer certains vaisseaux (vasoconstriction) qui irriguent des organes qui peuvent survivre avec peu d’oxygène comme la peau en arrosant l’ensemble du corps d’adrénaline. Il va aussi diminuer la fabrication d’urine (eau donc du volume)….
Attention
- Ce n’est pas parce que la tension est normale voire élevée
- que le blessé ne saigne pas dans son abdomen
◁ Revoir comprendre détresse circulatoire
Détresse respiratoire
Un traumatisme du thorax peut gêner l’inspiration donc l’apport en oxygène.
La douleur d’une fracture de côte ou pire de plusieurs côtes ou d’un volet thoracique diminue l’amplitude respiratoire.
En présence d’un pneumothorax ou d’un hémothorax le blessé ventilera sur un seul poumon.
La détresse respiratoire sera immédiate si les lésions sont importantes ou apparaitra plus tard par épuisement.
Elle est majorée si la personne a des antécédents respiratoires : asthme, bronchite chronique, insuffisance respiratoire chronique…
◁ Revoir comprendre détresse respiratoire
Bilan
Bilan vital
En quelques secondes, en approchant la victime, on peut dépister une détresse vitale:
- hémorragie artérielle principalement de l’artère fémorale
- inconscience
- arrêt circulatoire
Recherche d’une détresse
Détresse circulatoire
◁ Revoir page “bilan circulatoire”
Aucun doute, une détresse circulatoire chez un traumatisé est en rapport avec une hémorragie externe, extériorisée ou interne après avoir éliminé un simple choc traumatique qui céde en partie à l’immobilisation des fractures et en déstressant le blessé.
Il faut la rechercher particulièrement en présence:
- d’une plaie thoracique ou abdominale par balle ou arme blanche
- une contusion thoracique ou abdominale avec douleur, éraflure cutanée
- une fracture probable du bassin par écrasement
- une fracture du fémur (cuisse)
- décélération brutale…
Il suffit de penser à chaque organe ” mal perfusé” par le sang pour ne pas oublier un signe clinique.
Hélas l’examen circulatoire est parsemé de pièges. C’est plus l’association de plusieurs signes et du contexte qui permet de reconnaître le choc.
Conscience
Tout est possible: de la conscience normale à l’inconscience en passant par la désorientation ou l’agitation.
Ne pas oublier les petits signes : angoisse, bâillement, soif.
Attention
- Nombreux pièges !
- blessé “trop calme” et qui saigne…
- “Cuite aigue”: désorientation attribuée à l’alcool alors qu’il s’agit d’une hémorragie interne ou d’un grave traumatisme crânien
Pouls
souvent rapide, mais émotion, stress, douleur…
Un pouls périphérique (radial) filant voire absent (mais carotidien +) est un bon critère de gravité.
Exceptionnellement le pouls est très lent dans un état de choc.
Tension artérielle
SI une tension très basse, voire absente (mais pouls carotidien) lève le doute et confirme un saignement.
Il ne faut pas se rassurer avec une tension normale voire haute (qui n’élimine pas une hémorragie interne).
Respiration
Elle peut être rapide, mais il existe bien d’autres causes que le choc hémorragique.
Peau, extrémités
La pâleur est un bon signe, mais la peur, la douleur rendent aussi la peau plus terne.
Les conjonctives sont blanches.
Détresse respiratoire
Ecoutez (plaintes)
- J’étouffe
- J’ai mal quand je respire
- Je suis gêné pour respirer
Observez (signes)
- Respiration rapide et superficielle
- Battement des ailes du nez
- Parole vite interrompue
- Sueurs, Cyanose
- Tirage respiratoire (muscles du cou faisant saillie sous la peau lors de l’inspiration)
- Chute de la saturation en oxygène
Il est important de rappeler qu’une agitation, une confusion, voire un coma peuvent avoir comme origine une asphyxie.
Bilan circonstanciel et antécédents
Citons comme événements favorisants une lésion interne:
- chute d’un immeuble (on parle de défénestration)
- éjection
- grande vitesse
- écrasement par un engin lourd
- plaie par arme blanche ou balle
Parfois le traumatisme est ancien, bénin au point que la personne ne se souvient pas (rupture de rate en 2 temps)
Parmi les antécédents, il faut rechercher la prise de médicaments qui fluidifient le sang: aspirine, anticoagulants, plavix.
Bilan traumatique spécifique
Ecarter les vêtements avec pudeur, à défaut glisser vos mains réchauffées.
Thorax
Lors d’un accident, l’examen du thorax est obligatoire même en l’absence de détresse, bilatéral, comparant le côté droit et gauche.
Attention à une contusion au niveau des côtes basses, car en dessous il y a à droite (le foie) et à gauche (la rate), 2 organes pleins de sang.
Le blessé conscient se plaint d’une douleur à la respiration lorsqu’une côte est cassée.
Inspection
Un hématome, une éraflure (surtout si le volant est devant) confirme le traumatisme thoracique.
Si la plaie est “bullante” (air mélangé au sang à chaque inspiration) l’objet a pénétré dans le thorax et risque même d’avoir fait un pneumothorax.
Palpation
Chez la personne inconsciente, une main passée de chaque côté du thorax en plusieurs endroits peut révéler une sensation très désagréable de craquement à chaque inspiration (fracture de côte).
La peau est parfois “soufflée” comme le célèbre “bibendum Michelin” et l’appui ressent une crépitation comme si “on s’enfonçait dans la neige”. Il s’agit d’un emphysème sous-cutané.
On peut observer une
anomalie de soulèvement de la poitrine, voire un enfoncement paradoxal d’une partie de la cage thoracique à l’inspiration, confirmée par la main.
Auscultation pulmonaire
A travers la paroi, on peut entendre ou non (pneumothorax ou hémothorax) le bruit des alvéoles qui se déplissent à chaque inspiration.
Pour cela on utilise un stéthoscope.
Son usage est réservé aux médecins
Abdomen
On recherche : contusion, plaie, éraflures, éviscération.
Si le blessé urine, vérifier la couleur des urines (sang ? = hématurie), mais ne pas demander d’uriner
Bassin
Une douleur antérieure lors d’un accident non violent est rassurante (petite fracture).
Palper le pubis (en avant) et les crêtes iliaques (sur les côtés).
Par contre le passage sur le bassin d’une charge importante (comme une roue d’un camion) est d’une extrême gravité.
Gestes
Gestes habituels
◁ Revoir les différents gestes de secours
- Alerte (toujours demandé du renfort)
- LVA
- Retrait du casque
- Retournement
- Maintien position attente
- PLS si inconscient
- Collier cervical
Gestes spécifiques
Le blessé sera rassuré et réchauffé.
Une oxygénation est indispensable.
Malgré sa soif, aucune boisson ne sera administrée.
Le centre 15 (SAMU) est prévenu.
En attendant l’arrivée de l’équipe médicale (SMUR), on essayera de stabiliser les détresses.
Détresse respiratoire
Le blessé conscient, sans lésion rachidienne est installée demi-assis.
L’inconscient en pls sur la lésion thoracique (afin de laisser respirer normalement sans l’écraser le côté sain).
Le blessé recevra en inhalation 9 l / mn d’oxygène avec masque à haute concentration.
Détresse circulatoire
L’oxygénation est la aussi indispensable.
Chez la personne consciente, plusieurs positions sont possibles :
– légèrement assis avec ou sans jambes un peu surélevés
– sur le côté
La flexion des cuisses diminue la tension abdominale.
Il faut être sur que le rachis est intact.
– à plat dos (indispensable si traumatisme du bassin), certainement la position la plus sage
(même si elle est angoissante pour le blessé, le rassurer, lui tenir la main, dialoguer en permanence)
En cas de détresse circulatoire majeure par hémorragie massive et de crainte d’un arrêt cardiaque, ,on peut surélever les 2 membres inférieurs à 90 °, mais attention +++, jusqu’à l’arrivée de soins médicaux, cette position doit alors être conservée !
Transport
Le blessé conscient, sans détresse respiratoire ni circulatoire sera transporté en ambulance après avis du centre 15.
Le blessé pourra recevoir si nécessaire de l’oxygène en inhalation.
On surveillera l’état de conscience, la ventilation et sa fréquence, la circulation et la coloration.
Toute dégradation demandera immédiatement une nouvelle évaluation et un bilan transmis au centre 15.
Points clefs
- Trauma thorax ou abdomen = Hémorragie interne ?
- Trauma thorax = Détresse respiratoire ?
- Trauma bassin = devant peu grave, écrasement = très grave
- Bien analyser les circonstances : décélération, trauma ancien
- Attention à la rupture de rate en 2 temps
- Une tension artérielle normale n’élimine pas une hémorragie interne
- Hémorragie interne , c’est une hémorragie non visible
- Toujours alerte le centre 15
- Oxygénation indispensable
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Le cours “trauma crânien et facial ” est téléchargable